L'un des meilleurs romans de G.Sand. L'analyse psychologique est extrêmement fouillée.
La scène inaugurale montrant un jeune homme (Thierray) se voyant suggérer que la jeune femme dont il est tombé amoureux dans un salon parisien (Olympe) est en fait une grand-mère est magistrale. Il pense que ses yeux ont été abusés et il renonce alors à sa propre perception au profit de l'image illusoire que les autres, par quiproquo lui renvoient. Il la voit vieille ! L'avis d'autrui prime et efface la perception propre. On a une scène similaire chez Proust (Du côté de chez Swan - scène de la Berma qui a déplu au jeune Marcel....jusqu'à ce que M.de Norpois lui explique qu'il s'est trompé ... le jeune Marcel révoque alors son jugement et lui substitue celui du prestigieux Norpois * ).En fin de roman G.Sand illustre de façon cette fois beaucoup plus dramatique ce même phénomène. Une jalousie furieuse est suggérée par calomnie à l'homme le moins jaloux du monde (Dutertre) concernant son épouse.
La prise de modèles est constante dans ce roman également (que le mimétisme soit conflictuel ou pas*), en particulier avec la jeune Caroline, qui aimait et admirait Olympe (sa belle-mère) et lui a finalement emprunté jusqu'à sa façon de parler, devenue adulte... et même une ressemblance physique (alors qu'il n'y a aucune parenté génétique).
Le roman fourmille par ailleurs de détails concrets sur la vie d'autrefois (location de chaise de poste pour se déplacer, présence des loups, utilisation des allumettes, existence des boîtes aux lettres - dans chaque commune de France (depuis peu). Un grand roman.
* cf. René Girard : "Mensonge romantique et vérité romanesque" quant au mimétisme du désir et la prise de modèles.