Interprétation brillantissime, idées de mise en scène nombreuses et parfois originales, mais que raconte vraiment ce film, au-delà d’une vision de la réalité présentée avant tout comme insaisissable? La question purement cinématographique - le cinéma est-il au fond plus vrai que la réalité, interroge le film, puisque c’est l’auteur/trice qui construit son vrai, lequel est saisissable - a certainement passionné la critique, mais le spectateur de base que je suis eût aimé pouvoir croire à au moins l’une des 3 hypothèses (crime, suicide ou accident). Or aucune ne me semble crédible. Et l’acces à la réalité et sa causalité est un balancement entre des possibles-crédibles, pas entre des impossibles-improbables. L’accident est exclu, le meurtre très improbable, le suicide rendu crédible par une révélation finale aussi tardive qu’invraisemblable (dans la précision du récit - on aimerait d’ailleurs savoir si l’enfant a inventé ce recit décisif).
Le film souffre par ailleurs d’une ressemblance trop forte avec le documentaire « Staircase » de J-X de Lestrade : un écrivain bisexuel accusé du meurtre de sa femme suite à la chute de celle-ci (dans l’escalier). Dans « Staircase » aussi, on ne connaît pas la vérité, mais le propos, centré sur ce que fait la justice, et non sur ce que vit la protagoniste, est beaucoup plus clair. Dans le film de Justine Triet, il n’y a pas vraiment de protagoniste auquel on puisse s’identifier, puisque l’héroïne ne nous est pas accessible, que l’enfant n’est pas assez présent et que l’avocat ne vit presque pas de conflit. Je ne savais pas que c’était une qualité au cinéma.