Il était normal de mettre une aussi bonne note à un film musical qui resplendit pour sa justesse et son rythme.
La qualité du film n'est plus à prouver tant sur la question de la réalisation que sur la performance impressionnante des deux acteurs principaux Miles
Teller et J.K Simmons, que l'on pourrait encore regarder jouer pendant des heures.
Ancré dans le jazz et dans la rigueur musicale, le film en est rempli de références. Damien Chazelle choisit des musiciens professionnels pour jouer les membres du Big Band, l'acteur principal est également un bon batteur, suffisamment expérimenté pour assumer le rôle.
Là où le film est particulièrement précis dans sa cohérence c'est qu'on entend le jeu de Buddy Rich dans celui de l'acteur
principal. Le morceau Caravan qui marque l’apothéose de la montée en tension avec un solo dantesque, s'inspire directement d'un solo mythique de Buddy Rich au Concert for the Americas.
Le film contient certaines scènes complètement folles qui se déroulent sur 20 minutes sans ellipse. Le magnétisme des acteurs, la justesse des dialogues et surtout le rythme du montage rendent à mon sens ces scènes inoubliables, les élèvent à ce qui se fait de mieux pour le grand écran.
Les deux personnages principaux, sont particulièrement aboutis et leur antinomie explosive donne lieu à une confrontation saisissante. Principalement psychologique,
le film dessine l'affrontement de ces deux tempéraments haut en couleurs dans une véritable montée en
puissance jusqu'au final. Le film peint ce dualisme entre la rigueur musicale, et la certaine liberté que le Jazz
offre, métaphore de la confrontation entre l'intransigeance de Fletcher et son émancipation.
Sans être pompeux ou inutilement symbolique à travers des métaphores alambiquées, Whiplash a un grande dimension philosophique et questionne notre rapport à l'autorité. Le film très juste questionne si bien cette ambivalence que les deux notions de règles et d’affranchissement paraissent alors tout à fait complémentaires. Andrew ne s'oppose pas à Fletcher sans avoir essayé d’être aussi ponctuel qu'un métronome, aussi juste qu’un diapason.
Andrew s'exprime, brave les dogmes après les avoir intégrés et compris, et dans cet élan libertaire
s'affirme comme Charlie Parker, John Coltrane, ou Ornette Coleman partageant tous la même
culture de la contrainte et de la désobéissance.