Préface
Ils sont cinq copains lies comme les doigts de la main, cinq étudiants échoués dans le campus d’une université, vaste comme un territoire, depuis longtemps en naufrage, cinq jeunes algériens d’aujourd’hui, liés pour le meilleur, le pire et parfois le rire. Le héros sans nom, amoureux de Soumaya, Malik, dit le Che, révolutionnaire en herbe et ompénitent fumeur de Nassim, une cigarette algérienne brune, tout comme son amoureuse Nassima, Djillali dit Josépé du nom du héros de Au nom du père, son film culte, Salim, poète à ses heures perdues, Don Juan local, amateur de poésie, de peinture et de parfum Hugo, Amine, le beau gosse du groupe, tendance italienne, pizzario hors pair.
Il sont beaux, jeunes et romantiques. Dans leur ivresse juvénile, ils pensent que le monde se cueille comme une fleur des champs. Entre les quartiers populaires poisseux où ils habitent et l’université sinistrée où ils font semblant d’étudier, ils traînent leur mal-vie dans une ville sans joie qui n’offre à toute une jeunnesse désabusée que le bar pour noyer son mal de vivre sur terre ou la mosquée pour l’oublier en le confiant au Ciel. Face au port ouvert sur des évasions impossible, des rêves de voyage irréalisables, ils s’évadent en fumant du hashish et s’inventent, les soirs de déprime, des paradis artificiels, dans leurs coin secret qu’ils ont baptisé « Entre Ciel et Terre.»
Dans ce récit où prose, poésie et théâtre se melent, Khaled NAILI, enfant de la balle « sauvé » par cette école algérienne qu’on dit sinistrée, s’adonne, en poète inspiré, au jeu des mots d’un « francais moins beau que l’arabe» pour dire la vie pertubée d’une génération qui n’a connu-hormis la parenthése du « vert paradis des amours enfantines » - que la désolation d’un pays déchiré. Les puristes de la langue, s’ils n’entendent pas le cri déchirant de derrière les mots, s’en offusqueront sans doute. Ils s’en désoleront profondément s’ils ne saisissent pas « cette lueur d’espoir dans les yeux, cette ambition et cette vigueur de changer tout et d’aller au-delà de la réussite » qui animent Malik et ses quatre amis, symbole de toute une génération, si leurs amours ne s’étaient pas brisé sur « les écueils de la vie quotidienne ». Si seulement…
Lazhari Labter
Alger, le 08 mars 2004